28 Août: Ce matin nous nous séparons de Maud et Seb, nous prenons des routes différentes et nous nous reverrons en France puisque ils sont de Lyon où se trouve la moitié de notre famille. Alors à dans 6 mois les gones!
Nous partons sur Nobres, une petite ville où parait il les eaux des rivières sont très claires et très poissonneuses. On se dit que ce serait peut-être une bonne alternative à Bonito, la ville du Pantanal Sud où les tarifs pour se tremper dans un ruisseau sont prohibitifs. A Nobres, le tourisme est une activité très récente et on espère que les programmes aquatiques seront à la hauteur de nos espérances. C’est quand même à 200 km au Nord de Poconé, et le paysage est très très sec, cela fait très longtemps qu’il n’a pas plu et tous les bords de route sont brûlés, ou en train de brûler.
Nous arrivons à Nobres et nous nous faisons indiquer Bom Jardim, le village où se trouvent ces fameuses rivières. C’est à 58 km d’ici, et malheureusement, c’est de la piste comme on déteste, avec de la belle tôle ondulée et de la terre fine. Et par bonheur, sur la piste, nous trouvons juste ce qu’il faut pour calmer les nerfs et pour nous rincer de toute cette poussière. Un ruisseau au goût de paradis.
L’eau est claire, les oiseaux sont tout en couleur, les papillons virevoltent et les capucins sautent de babaçu en babaçu. Et nous sommes tous seuls tranquillou pour profiter de tout ça.
29 Août: Pourquoi ne pas rester un jour de plus ici? Nous faisons de la nage à contre courant, des pêcheurs nous offrent des fruits d’anacardier, et nous ne sommes pas pressés de faire le reste de la piste.
30 Août: Nous voilà à Bom Jardim, un village microscopique, on comprend pourquoi il n’apparait ni dans les guides, ni sur la carte. Il y a cependant une piscine naturelle magnifique qui grouille de poissons. Nous pouvons camper devant et nous sommes accueillis par une bande de capucins coquins qui n’hésitent pas à sauter sur le toit du camion pour regarder ce qu’il y a à l’intérieur. Ils fouillent tout, entrent dans la cabine, passent la tête à la moindre porte ouverte, se pendent la tête en bas et scrutent notre intérieur. Ils sont mignons avec leur petits sifflements variés et leurs mimiques qui leurs donnent des expressions humaines... mignons mais ... voleurs. Sans que je m’en aperçoive, l’un d’entre eux est entré jusqu’à moi sans faire un bruit, et nous a chapardé la boite d’oeufs.
Thille le voit partir en courant sur ses deux pattes et sans avoir eu le temps de le rattraper, le voilà qui déguste ses sept oeufs tout seul sur une branche tranquillement sous le regards envieux de ses potes.
Je ne suis pas contente du tout et lui souhaite une bonne crise de foie.
Du coup, on planque tout car ils deviennent envahissants et l’un d’entre eux, le dominant et le plus gros est limite agressif, il me prend ma boite de biscuit des mains, je ne lâche pas mais il a une force incroyable et tire fort de son côté en montrant ses dents. Il finit par lâcher prise en même temps que moi, et dans mon élan, la boite valdingue et tous nos biscuits se retrouvent par terre. Là, il faut faire vite pour ne pas se faire tout chiper, les voilà qui débarquent! La guerre est ouverte les gars, Thille reçoit une belle crotte sur le bras, ils balancent leurs restes sur le toit, alors nous sommes obligés de chasser cette bande de voyous. Ils sont trop habitués apparemment à ce que les guides qui passent ici pour emmener les touristes à la rivière s’arrêtent et leur donnent des oeufs et des bananes pour amuser les clients. Pas très reconnaissants et mauvais caractère!
On se fait accoster par un guide, un de ceux qui entretient les mauvaises habitudes de ces petits cons de singes car il les nourrit avec ses clients Canadiens, comme s’ils n’avaient pas assez bouffé!
Mais bon, ça fait partie du jeu, c’est tellement rigolo de les voir marcher sur leurs pattes arrières les mains remplies des cadeaux offerts par les humains qu’on a rien à dire, nous avons déjà joué à ça aussi...
Ils nous parle d’une rivière très belle à l’eau claire pleine de poissons où on se laisse emporter par le courant sur plus d’un kilomètre. On ne peux y aller seuls puisque l’endroit se trouve sur une propriété privée et il faut obligatoirement payer un guide. On se demande bien s’il existe un seul bel endroit ouvert au public qui ne soit pas payant ou sur une propriété privée au Brésil. Tous ces beaux coins se trouvent dans des fazendas et ils ne se gênent pas pour taper fort sur les prix.
On décline gentiment sa proposition car nous sommes devant l’ estivado, cette piscine naturelle très jolie qui nous fait bien envie et ça ne coûte que 5 réais pour s’y baigner toute la journée.
Il nous propose de faire cette activité demain pour 50 réais par personne, on va réfléchir car on sent un peu l’attrape couillon.
La baignade est super agréable, si on fait abstraction du fait que certains petits poissons à la robe rayée sont très attirés par nos doigts de pieds ou par nos zones moelleuses derrière les cuisses ou aux poignées d’amour. Ils mordent parfois assez fort pour nous faire sursauter et rire aux éclats! (ou grogner après eux!) On en profite pour se faire nettoyer le bord des ongles des pieds.
On sort le caisson étanche pour la faire quelques images et photos car l’eau est cristalline. Nous nageons parmi les piraputangas, les piaus et quelques dourados.
La journée est excellente, nous sommes les seuls clients et nous mangeons ici où la jeune fille gardienne des lieux nous propose un repas très copieux et à volonté de crudités, de viandes grillées, de frites de manioc, accompagnées évidemment du sempiternel riz-haricots rouges.
31 Août: finalement nous décidons d’aller faire cette excursion puisque nous sommes à côté et les Canadiens de retour hier nous ont dit que ça valait le coup. Nous allons donc à la pousada Bom Jardim pour nous inscrire.
L’homme que nous avons vu hier n’est pas là, alors le jeune propriétaire des lieux nous en trouve un autre, et c’est parti! Enfin presque, nous ne voyons pas de voiture pour nous emmener, alors je pose la question du transport et il nous dit qu’il faut nous y rendre avec notre propre véhicule. Première déception, je vais me taper 36 km de piste à l’arrière dans le sauna sans rien voir. Nous aurions aimé nous faire trimballer pour une fois, mais bon, allons y quand même.
Nous arrivons à la pousada qui prête masques gilets et sandales. Nous avons déjà notre propre matériel mais pas le guide. Une fois garés à l’ombre de l’énorme manguier, nous sautons à l’eau avec nos combis bien que l’eau ne soit pas glacée (c’est parce qu’on pense que ça va durer longtemps) et nous nous laissons bercer et entrainer par le courant du rio Triste.
C’est vrai que l’eau est cristalline, cela vient du fait que l’eau de la rivière jaillit des sources souterraines dans les couches calcaires qui libèrent du carbonate de calcium dans l’eau, ceci calcifie les impuretés qui se déposent sur le lit de la rivière. L’endroit est très joli et on se dit que les propriétaires de ce terrain ont bien de la chance de vivre ici.
Se faire entrainer par le courant sous cette végétation luxuriante est très agréable, les poissons nous suivent sous l’eau, et nous ne faisons aucun effort pour avancer.
Nous voyons trois raies lors de notre glisse, cette fameuse raie si redoutée pour son dard venimeux qui laisse un souvenir douloureux plus de 24 h parait il. Je lis dans le bouquin sur les poissons que nous a offert Sandro qu’elle peut vivre 80 ans et peser jusqu’à 60 kg!
Lorsque nous levons le nez, nous voyons des aras passer et des capucins sauter d’arbre en arbre. Mais la féerie reste de trop courte durée selon nous, au bout de 25 minutes, nous voilà déjà à l’autre bout du méandre qui rejoint presque l’endroit d‘où nous sommes partis, quelques dizaines de mètres et nous voilà au camion.
Deuxième déception, nous pensions pouvoir batifoler un peu plus dans la flotte, mais visiblement, il faut revenir à Bom Jardim même si c’est avec notre propre véhicule que nous sommes arrivés là.
Bilan, même si c’est trois fois mois cher qu’à Bonito, c’est peut-être trois fois moins bien, et nous sommes quand même un peu déçus du peu de temps passé sur place pour le prix. Donc on sentait l’attrape touriste, et on s’est fait avoir quand même un petit peu.
Nous revoyons au petit resto du coin le premier gars qui nous avait fait la pub de cette rivière, accompagné du proprio de la pousada. Thille lui dit qu’on a trouvé l’excursion trop rapide, alors il nous offre une bière et nous propose de nous guider gratuitement jusqu’aux grottes qui sont très jolies à voir selon lui. Mais finalement nous refusons poliment car c’est à 30 bornes de piste d’ici et nous n’avons pas envie de nous les farcir pour voir des cavernes qui n’apparaissent même pas en photo sur les fascicules publicitaires de la région. Et puis nous savons depuis longtemps que la beauté d’un lieu est vraiment subjective et nous avons maintenant pas mal vu de belles choses qui nous permettent de comparer. Ce qui valait le coup pour les Canadiens ne valait pas pour nous une bonne baignade dans les gorges du Verdon par exemple!
Nous restons à Estivado, qui nous sert de camping gratuit où la jolie rivière passe à côté du camion, devant une petite forêt et cela nous va très bien pour finir cette journée ensoleillée accompagnés de nos voyous préférés et des cris rauques des aras qui passent régulièrement au dessus de nous pour rejoindre les palmeraies où ils se nourrissent.
1 er Septembre: Nous quittons ce petit village où la nature est si belle mais où les prestations touristiques sont un peu prétentieuses.
La route pour rejoindre Cuiaba est toute neuve et donc certains tronçons sont en travaux et les déviations nous font passer par une petite piste rurale jolie avec de nombreux ponts et ruisseaux et pas trop défoncée pour une fois.
Nous passons dans Cuiaba, ville aux grattes-ciel assez hauts peu séduisants où seules les cabines téléphoniques dans ce style donnent du charme aux rues.
Peu après, nous nous retrouvons en plein road movie, sauf que le film, c’est Duel de Spielberg, et on se sent comme la voiture harcelée, on se fait quelques bonnes frayeurs avec ces camions qui vont à une vitesse folle, qui se collent aux fesses, qui doublent sans aucune visibilité dans les montées et on se dit qu’on pourrait bien en voir un arriver en face à toute blinde et finir comme ceux que l’on voit sur le bas côté échoués sur le flanc et brûlés jusqu’à la carcasse. Si nous avions des noix de babaçu entre les miches, on arriverait à les ouvrir tellement on serre fort!
Ils donnent l’impression de n’avoir aucune conscience du danger ou de la mort, comme des gosses. Nous nous sentons vraiment tous petits et bien seuls car aucune voiture ne se trouve sur cette route, que d’énormes bahuts à remorque.
Nous roulons jusqu’à un peu avant Jaciara et nous nous arrêtons dans un posto, un de ces café-resto sur le bord de la route qui propose toutes les commodités. Ces petites aires de repos sont de vrais refuges pour se reposer et passer la nuit. Chacun peut y accrocher son hamac à l’ombre d’un manguier, boire bien frais et manger à volonté pour une petite somme.
Là où nous nous arrêtons, les douches sont irréprochables, l’accueil très chaleureux, et nous pouvons nous détendre sur le grand terrain derrière la maison de la dame très gentille qui nous fait goûter sa cachaça d’alambique.
Nous sommes tellement fatigués que nous n’entendons même plus les camions qui passent et nous nous endormons après avoir mangé en regardant le feuilleton dans le petit resto refuge, sans demander notre reste.
2 Septembre: Nous roulons jusqu’à Coxim, le trafic de camion est moins dense, plus tolérable, et quelques groupes de aras et toucans viennent illuminer la route de temps en temps.
Coxim est au bord du Rio Taquari, très jolie petite bourgade de 30000 habitants, tous fanas de pêche.
Après avoir demandé à l’association des pêcheurs si nous pouvions stationner pour dormir derrière leur bâtiment, nous nous installons sur ce joli terrain avec vue sur le fleuve.
Nous sommes abordés par Tonico, un client de l’hôtel jouxtant le terrain. Il nous propose de boire une bière bien glacée et ainsi nait une nouvelle amitié de passage qui rendra notre séjour bien plus agréable. Il nous donne l’accès aux toilettes, nous propose la douche de sa chambre et même le code internet de l’hôtel.
Il nous présente son ami musicien, sa femme et la belle petite Giovana qui nous fait craquer avec ses grands sourires.
Tonico nous propose de manger une pizza où jouent ses amis musiciens qui feront même une dédicace très touchante à notre égard, ainsi, tous les clients du resto se tournent alors vers nous comme s’ils savaient déjà qui étaient les deux Français dont le chanteur parle. Faut dire que je suis habillée bien bien moins sexy que toutes les Brésiliennes qui se trouvent ici, sans exception et on voit tout de suite que je ne suis pas d’ici. Un vrai concours de tenues olé olé, de brushings, d’ongles peints, de talons hauts, de bijoux, de décolletés... je suis la seule à avoir la touche décontractée!
Le Thillou quant à lui, on le prend pour Sting, on lui a dit étrangement plusieurs fois à Caceres, ou à un acteur américain pour les gens d’ici. Nous trouvons ça bizarre car nous ne voyons pas la ressemblance, mais bon, ça nous fait marrer.
3 Septembre: Nous restons une journée de plus, Tonico nous invite à un churrasco, l’équivalent de la parrilla Argentine à peu de choses près. Il embroche un gros bout de viande pané de gros sel et en découpe quelques morceaux à mesure qu’il cuit, comme cela se fait dans les churrascarias où les serveurs passent avec de grandes brochettes et vous découpent un bout bien cuit directement dans l’assiette, fait le tour des tables pour en proposer jusqu’à ce que le coeur rose apparaisse, puis va remettre le reste à cuire sur le barbecue.
Nous retournons à la pizzéria pour revoir les copains chanteurs et passons à nouveau une agréable soirée à s’entrainer à essayer de parler et surtout de comprendre le Portugais puisqu’aucun d’entre eux ne parle ni Anglais ni Espagnol. Faut bien se lancer, mais ça épuise!
4 Septembre: Avant de nous quitter, Tonico nous indique un endroit très chouette sur la route à 60 km d’ici. Camping et cascades, il n’en faut pas plus pour nous convaincre, embrassades, et nous voilà à la recherche de la cachoeira sete quedas à Rio Verde.
Pour une fois, c’est un lieu facile à trouver car bien indiqué. Nous entrons dans le camping et allons voir les cascades, et là, nous tombons amoureux des lieux, l’endroit est merveilleux.
Il y a quelques familles car c’est Dimanche, mais les gens ne campent pas là, nous sommes les seuls clients du camping.
C’est tout bonnement féerique, et nous ne nous attendions pas à un tel endroit sur notre route alors que nous ne traversons que des champs de coton, soja et canne à sucre. Il y a sept cascades d’eau fraiche et transparente qui dégringolent dans des bassins couleur lagon. Les plages de sable blanc et fin nous donnent l’impression d’être au bord de la mer. Pour la touche magique, aras et toucans passent quelques fois par jour au dessus de ce décor enchanteur.
5 Septembre: Lundi, nous sommes seuls, les cascades rien que pour nous, il n’y a même plus le gardien à l’entrée, il nous faudra chercher le proprio pour payer une journée de plus car nous comptons rester ici aujourd’hui, nos uniques voisins sont ces grands oiseaux au look de Bip Bip le road runner, à la silhouette tout aussi curieuse que leur nature, ils passent et repassent devant le camion et nous regardent avec leur grands yeux.
6 Septembre: Nous levons le camp (à contre coeur vous vous en doutez) très tôt pour avaler des kilomètres de bitume encore et encore à regarder défiler les milliers d’hectares de plantations d’eucalyptus à papier, de prairies d’élevage de zébus et d’autruches et du coton, et du soja encore et encore. Nous nous arrêtons dans un posto tranquille pour la nuit car il faut bien reposer un peu le moteur qui depuis le début du Brésil se refroidit avec de l’air à 40°.
Et dans la famille Tex Avery, je demande Woody wood Pecker et sa crête Punk!
Enfin nous arrivons à Corumba, complètement au Sud de Caceres séparés par le Pantanal dont nous traversons encore une petite partie où jacarés et oiseaux échassiers s’ébattent dans les lagunes au bord de la route.
Corumba est la ville frontière avec la Bolivie où nous ferons demain nos formalités de passage.
En attendant, nous prenons notre dernier repas Brésilien et notre dernière eau de coco avec le sentiment d’avoir bien profité de ce mois passé dans ce merveilleux pays à la population si charmante dont la joie de vivre se résume à un pouce levé et à un «tudo bem», où les rencontres brèves sont toujours accompagnées d’un petit cadeau, d’un jus de fruit ou un café offert dans les magasins ou les stations services, et où les amitiés que nous avons tissées resterons pour toujours inscrite dans nos vies. Alors merci pour tout Brésil et Brésiliens!
suite en Bolivie en construction