10 Novembre: De notre campement aux chants d’oiseaux au bord de la rivière à la frontière Equatorienne, il n’y a que 47 km. Nous y allons de bon coeur car nous voilà au bout de notre peine, un si long trajet juste pour régler le problème d’autorisation temporaire du véhicule. Il nous faut le prolonger de 3 mois. La route qui y mène est surprenante par son paysage sec et vert à la fois, un univers de bananiers et de forêts de Ceibo, au milieu d’herbes sèches grillées par un soleil à 38°.
Ces arbres aux airs de géants se démarquent dans la forêt par leur splendeur et leur âge vénérable.
Formalités douanières sans soucis, nous arrivons à Macara, la première petite ville que nous rencontrons sur la route et allons vérifier nos e-mails au cyber. C’est là que nous voyons un message de Claude et Alain qui disent nous attendre sur la place du village de Las Lomas. Zut, nous étions hier au même endroit sans s’être vus. Nous pensons donc repasser la frontière dans l’autre sens aussitôt, avec l’appréhension que les douaniers nous prennent pour des fous indécis et refusent.
Pas de problème pour les Equatoriens, en revanche, la douane Péruvienne nous interdit de rentrer au Pérou le même jour que la sortie. Re- ZUT, on vient de faire tamponner la sortie sur le passeport côté Equateur. On verra bien demain.
Nous envoyons un mail à Claude et Alain pour leur dire de ne pas s’inquiéter, nous serons là demain.
La recherche d’un endroit pour dormir nous permet d’observer un peu la façon de vivre ici. Nous constatons que les Equatoriens ont la culture du hamac, pas une maison ni une boutique sans un hamac qui se balance devant le seuil. Les arcades des rues sont pourvues de crochets afin que quiconque ait envie de piquer un roupillon puisse accrocher le sien.
La montagne nous interdit le bivouac dans les prés, nous passons devant une institution ministérielle qui loge les travailleurs de la route. Nous demandons à la gardienne si nous pouvons nous garer à l’intérieur, sa réponse est gênée mais négative car l’ingénieur n’est pas là et elle ne sait pas si elle a le droit.
Pas grave, nous dormirons dans un renfoncement de la route en face. Une heure après, celle-ci vient nous chercher, de peur qu’il nous arrive quelque chose. «Il y a des attaques à mains armées ici et c’est trop dangereux si on vous voit là, Venez dans l’enceinte de l’institution». Du coup, Elsa et sa fille Dana sont bien heureuses de nous recevoir et de pouvoir nous poser mille questions sur notre pays. Elles nous préparent du motté, un maïs à gros grain qui se mange ici avec des oeufs brouillés et de la salade d’oignons. Nous faisons une sauce tomate pour leur faire goûter mais comme elles nous le disent avec diplomatie, «ce n’est pas trop dans nos habitudes!» Bref, on ne fait pas fureur avec nos pâtes.
11 Novembre: Nous sommes réveillés à 7h par Elsa qui nous a préparé pour le petit déjeuné le plat favori des Equatoriens, le «wata con manis», des tripes de vaches à la sauce cacahuète!!! Humm, le Thille qui ne déjeune jamais se fait un plaisir à goûter ce plat préparé avec tant de gentillesse. Pour ma part, n’aimant pas spécialement les tripes, j’arrive à me débiner et me faire faire des oeufs, sans savoir qu’ils seraient brouillés et perdus au milieux d’une montagne de riz. Nous passons un bon moment ensemble, Elsa veut nous envoyer Dana en France en été! C’est d’accord, mais il va falloir qu’elle se mette aux pâtes à la sauce tomate!!!
C’est le ventre bien bien plein que nous les quittons en se promettant des nouvelles par internet. Nous avons dormis sur nos deux oreilles grâce à leur hospitalité et nous les quittons tôt afin d’être à la douane le plus tôt possible. Nous faisons nos papiers pour le véhicule sans trop de problème, juste le chef des douanes qui prend son rôle un peu trop à coeur, «vous sortez, vous rentrez, que-ce que vous fichez au Pérou, vous travaillez dans le pays ou quoi! ben non, vous ne
rentrerez pas aujourd’hui.» Un malaise s’installe, mais finalement le chef se déride et comprend bien que nous ne sommes que des touristes. Nous allons faire à nouveau tamponner nos passeports, mais le gars regarde bien les dates et voit que nous sommes sortis hier de l’Equateur. Donc ça ne va pas, il nous dit de re-rentrer en Equateur et en re-sortir aujourd’hui pour qu’il puisse nous faire le tampon de l’entrée du Pérou....Un mic-mac qui nous rend fou, finalement après discussion, il fait ce qu’il n’a pas vraiment le droit de faire. Ouf, nous voilà à nouveau au Pérou à la recherche de Claude et Alain, qui nous attendent bien sagement sur la place de Las Lomas. Retrouvailles depuis La Paz, et recherche d’un bon coin pour la nuit. C’est Jaimie qui nous l’indique, un Péruvien qui a apprit le français au Canada et en Guyane. Celui-ci tient une boutique de petites douceurs à Piura, nous passerons le voir en redescendant.
C’est devant un enclos à vaches au bord d’une grande réserve d’eau que nous trouvons notre bonheur.
Nos voisins sont cabris, cochons, oiseaux... nous sommes tranquilles et le peu de personnes passant près de nous nous saluent avec beaucoup de courtoisie.
Les cow-boys ramènent le troupeaux de belles vaches et taureaux aux allures de zébus et avons maintenant une centaine de vaches pour voisines.
12 Novembre: Nous sommes réveillés par les cow-boys attrapant au lasso chacune de leur vache afin de les traiter au pulvérisateur, puis nous partons en même temps qu’elles.
Nous passons comme promis chez Jaimie à Piura et allons faire quelques achats de gâteaux et autres caramels dans sa boutique où il nous présente sa famille. Nous ferons avec lui un tour en ville afin qu’il nous indique un garage pour rafistoler le camion d’Alain. Merci Jaimie pour ta gentillesse.
13 Novembre: Nous retrouvons la ville de Chiclayo mais faisons halte avant à Lambayeque, où se trouve un formidable musée consacré entièrement aux fouilles des tombes de la civilisation Mochica, (-200 à + 700 Après JC.) Les trésors trouvés dans les tombes sont tels que les archéologues comparent cette découverte à celle de Toutankhamon. En effet, le seigneur de Sipan, comme il est nommé, a été enterré avec tous ses effets personnels, dont ses énormes et magnifiques boucles d’oreilles en or et turquoises, sans parler des colliers pesant en or et argent, des plastrons en perles de coquillage spondylus, et d’innombrables autres pièces précieuses et magnifiques. Ses femmes et enfants étaient tués au moment de l’enterrement et avaient donc l’immense privilège de voir leur future demeure, et vlan, dans l’trou! Un guerrier et un gardien faisaient parti du lot.
D’autres tombes ont été mises à jour, celle d’un grand prêtre, d’une prêtresse, d’un vieux dignitaire, et dans chaque tombe, toujours autant de trésors, or, argent, cuivre, turquoises, lapis lazulis...
Interdiction de prendre des photos dans ce musée où on est fouillé avant d’entrer. Mais il faut aller voir sur internet pour vous rendre compte de la qualité des ces objets précieux crées par des orfèvres d’un autre âge. Les fouilles se poursuivent, et qui sait ce qu’ils vont encore trouver dans ces pyramides de terre dans la région de Chiclayo...
14 Novembre: Nous roulons pour atteindre Cajamarca, mais c’est au bord d’une grande retenue d’eau que nous décidons de nous arrêter deux jours. L’eau est bonne, le coin est beau et tranquille, alors on en profite pour se tremper et enfiler des perles avec Claude. Nous avons pour seule compagnie un troupeau de chèvres sans berger.
16 Novembre: Après avoir fait une jolie route en zig-zag, nous arrivons à Cajamarca, capitale du Nord des Andes. Cette ville a tout le charme des colonies, elle a tous les attraits d’une ville moderne, mais a gardé une authenticité frappante aux premiers instants. Des personnages hauts en couleur déambulent dans ce paysage urbain des plus tranquille. Les femmes comme les hommes portent les mêmes hauts chapeaux en palme tissée à la façon des Panamas et leur donne vraiment fière allure. La plupart des femmes qui ne sont pas occupées à vendre leurs fruits marchent en tenant une bobine de laine à filer, comme si elle sortaient de la vogue avec une barbe à papa à la main.
Cette ville nichée dans les collines, à la particularité d’être chapeauté de tuiles rouges, chose rare en Amérique du Sud. Nous admirons plusieurs églises et grimpons à la chaise de l’Inca qui nous offre un panorama sur toute la ville.
C’est l’occasion de s’acheter un beau chapeau de palme, mais ce n’est pas celui-ci que j’ai choisi pour ramener en France, ça fait un peu Speedy Gonzales!
Et viva Italia!!! Piaggio a trouvé un bon marché ici, les taxis sont en majorité ces petits tri-cycles à moteur. Ailleurs, c’est plutôt les mototaxis comme ci dessous devant le Land Rover de Nicolas qui a prit un coup! :-)
D’ailleurs nous retrouvons Jessica, Nicolas et Elliot à la Hacienda San-Antonio, un lieu idéal pour le camping en pleine campagne près des fameux banos del Inca, où Atahualpa est venu soigner ses blessures de guerre dans les eaux chaudes après sa rencontre avec Pizzaro.
19 Novembre: C’est au moment de partir explorer les sites alentours de Cajamarca que le soleil repointe son nez, hier la journée à été terrible, un déluge et une météo menteuse ont réussi à nous faire croire que la saison des pluies était installée et en avance, mais fort heureusement, le soleil est de retour, enfin presque, quelques gros nuages refont apparition en milieu de matinée.
Jess et Nico partent en éclaireurs à Chachapoyas et nous partons à la recherche de la piste menant à Cumbemayo. Pas fastoche sans indication surtout quand les policiers ne savent pas indiquer une route pour un site archéologique à 20 bornes de là. Mais nous y voilà au bout d’une piste grimpant à 3550 m alors que nous sommes partis de 2600.
Nous arrivons devant des pénitents dans une forêt de pierres, où un petit garçon insiste pour nous guider au sommet.
Nous devons faire le même trajet à l’envers qu’à l’aller, mais nous bifurquons sur une presque parallèle de la panaméricaine afin de voir autre chose, et nous nous arrêtons dans un tout petit village d’éleveurs très gentils qui nous permettent de nous installer pour qu’Alain fasse un peu de mécanique ( car cela n’a pas été très bien fait à Piura!) et que nous puissions dormir en toute sécurité. Quelques uns nous tiennent compagnie et nous observent...
En fait nous ne sommes apparemment pas au bon endroit, Cumbe Mayo est en face, ici nous sommes à Magdalena, mais peu importe, cet endroit est aussi magique et n’est pas visité par les touristes. Il y a des canaux Pré-Incas taillés dans la pierre et le mystère reste entier pour nous quant à leur longueur, nous ne savons pas jusqu’où ils vont.
Le vent est sur son terrain de jeu préféré, il court sur les collines sans obstacle, et lorsqu’il en rencontre, il les sculpte et donne à cet endroit une ambiance mystique.
Nous devons remettre bonnets et blousons pour le supporter, et commençons une belle marche, et, le coeur battant et le souffle court, nous nous rappelons alors que nous sommes à 3500m.
Nous grimpons tout au haut des rochers abruptes afin de contempler Cumbe Mayo, où nous allons nous rendre tout à l’heure. Nous faisons la connaissance de la cousine de notre petit guide, qui nous joue alors la complainte qui revient souvent de la part des jeunes gens dans les environs, «donnez moi de l’argent», nous lui donnerons pommes, pain et même chaussettes que Claude lui offre avant de partir, mais ce ne sera pas suffisant, les deux enfants seront à la fenêtre des camions à réclamer encore plus.
Le chemin est escarpé et nous passons entre les falaises étroites, et observons la végétation accrochée aux parois, nous y voyons des broméliacées et autres buissons à fleurs, ça y est, le printemps est là aussi dans les Andes.
Nous prenons congés de nos guides improvisés afin de nous rendre sur le site de Cumbe Mayo, là où se trouvent des aqueducs taillés dans la roche, parfois à angle droit et datant de 2000 ans. certaines roches sont gravées de pétroglyphes et nous faisons la promenade autour de la forêt de pierres encerclée de ces fameux aqueducs pré-Incas long de neuf km.
Une petite mamie filant sa laine s’est assise dans un coin stratégique de passage de touristes afin de demander la propina comme les enfants, mais Claude lui donnera un gros bisou, c’est déjà ça!
Il n’est pas très tard, et pensons pouvoir dormir près d’un autre site archéologique de l’autre côté de la ville, Las ventanillas de Otuzco.
Nous trouvons un endroit assez animé non loin du site, mais à la nuit tombée, toutes les petites marchandes remballent et ne reste que le bruit de la rivière.
20 Novembre: Le soleil nous réveille toujours très tôt, ce qui nous permet aujourd’hui d’aller visiter cette nécropole pré-Inca, des niches funéraires dans lesquelles les corps étaient déposés une fois réduits, enfin, après déduction, étant donné la taille des niches. Nous sommes les seuls sur ce lieu, ce qui n’est pas plus mal car la visite est rapide, seules ces centaines de niches sont visibles.
C’est sous ce soleil rassurant que nous prenons la direction de Chachapoyas, le pays du «peuple des nuages». La route s’annonce belle et sommes déjà impatients d’y être.