1300 km jusqu’à Valdes

16 Septembre: Ce matin, Omar nous prépare 10 milanaises et une des pizzas que nous avons faites hier. Il y a bien sûr des restes car avons fait 9 pizzas hier soir pour nous 6, et les pizzas argentines sont du style américaines, bien épaisses et chargées! Pour le coup, nous avons à manger pour deux jours.

1300 km nous séparent de notre destination nature, cela va nous prendre plusieurs jours et aurons tout le temps «d’apprécier» la platitude des régions que nous allons traverser. En effet, la Pampa n’est pas ce qu’il y a de plus varié, mais, mon cher et tendre  ne voulait plus faire de montagne, il sera servi!

Et pourtant, c’est aussi ennuyeux  que ces montagnes pelées de la Cordillère. La souffrance de la mécanique en moins et le côté rectiligne en plus.

Nous choisissons de bifurquer sur une route un peu plus vallonnée sur plus d’une centaine de kilomètres, ce qui nous distrait un peu, passant de ranch en ranch, ébahis devant des milliers de têtes de bétail.

Mais très vite, nous retrouvons la Pampa et sa rectitude.

17 Septembre: Nous passons Bahia Blanca, une ville portuaire qui ne nous retient pas, et qui se trouve à la frontière de la Patagonie. Et pour y entrer, nous devons passer un contrôle phytosanitaire auquel nous ne nous attendions pas... et on nous contrôle pour nous confisquer toute denrée susceptible de véhiculer la fièvre aphteuse, et dans notre cas, notre saucisson tout neuf acheté la veille au soir est très dangereux pour la Patagonie, et on nous propose de le consommer soit tout de suite entièrement (il est neuf heures du matin) soit de le laisser aux bons soins des agents de contrôle... Je lui dis qu’on va le consommer de suite pensant faire demi tour et le planquer quelque part, mais Thille le lui donne en lui disant «cadeau» non sans un soupçon d’ironie. J’aurais voulu lui demander s’il voulait aussi mes crottes de nez puisque je suis un peu enrhumée mais je ne suis pas sûre qu’il en aurait fait son casse croûte comme le fera notre saucisse sèche! Nous devons également payer pour faire désinfecter le camion en passant à travers des fumigateurs. Bienvenidos a Patagonia!

Nous atteignons Viedma, petite ville charmante et propre, aux villas et jardins bien entretenus. Elle est bordée du fleuve Rio Negro donnant son nom à la Province dont elle est la capitale, celui-ci la séparant de la Province de Buenos-Aires. En face se trouve la ville de Carmen de Patagones, que l’on peut rallier en navette bateau. Ce que nous faisons, le temps est magnifique et on a envie de se dégourdir les pattes.

A 20 minutes de Viedma se trouve une station balnéaire nommée Balneario el Condor, un site prisé l’été pour ses plages et les activités s’y prêtant, char à voile, pêche sportive, bronzette, mais ce qui nous intéresse ici est la faune sauvage qui s’y trouve, notamment les 70000 perroquets de Patagonie ou Conures, qui nichent dans les falaises sur des dizaines de km le long de l’océan. C’est ici que se trouve la plus grande colonie de ces oiseaux, ici appelés Lorros Barranqueros. Ce n’est pas difficile de les trouver, il suffit de suivre à l’oreille leurs cris cacophoniques ne collant pas à leur beauté colorée.

Nous décidons de passer la nuit près du phare de la Barra, le premier phare continental de la Patagonie, le plus ancien toujours en service depuis 1887. Du haut de cette falaise, nous avons une vue plongeante sur les perroquets, ce qui nous laisse voir plus facilement leur plumage bleu et vert que nous ne voyions pas lorsqu’ils volent au dessus de nos têtes.

Le vent nous fait déguerpir des lieux, nous descendons en contre bas pour la nuit, seuls avec les oiseaux et à l’abri. Aux premières loges pour un coucher de soleil argenté sur les falaises et l’océan.

18 Septembre: Ce matin est un matin pas comme les autres, devant nous, mais malheureusement un peu loin, s’ébattent deux orques femelles pendant que nous prenons le café. C’est assez rare de les voir nous disent les personnes que nous interrogeons un peu plus tard dans le village. Nous sommes bien sûr excités comme des puces à prendre des dizaines de photos pour n’en avoir que peu de valables à cause de la distance et de la vitesse à laquelle ces cétacés battent de la queue.

Ceci est une promesse que nous fait la péninsule Valdès, déjà nous sommes gâtés par la faune marine, puis terrestre car en quittant les lieux, nous faisons la rencontre d’un animal qui de loin paraît grand comme un chien moyen, mais à la posture différente, la silhouette ressemble à celle d’un lièvre, mais avec de courtes oreilles,  Sa taille est impressionnante et sa robe au niveau du postérieur est semblable à celle du chevreuil. Qu’est-ce donc? Nous nous arrêtons pour étudier ces spécimens de plus près et faisons la connaissance du Mara, ou lièvre de Patagonie.

Notre choix pour la suite se porte sur el camino ce la costa, en se renseignant bien sur l’état de la piste puisque 184 km de ripio nous attend par là. C’est vrai que nous n’avons que trop goûté à la tôle ondulée et remettre ça sur près de 200 km nous dresse le poil. Nous sommes rassurés par les policiers puisqu’ils sont toujours décidés à nous contrôler, alors nous nous servons de cela pour les questionner un maximum sur les routes, et, toujours très serviables et courtois, se font un plaisir de nous indiquer les bons plans.

Ce chemin longe la côte et nous permet de rester en contact avec la faune et la nature, plutôt que de rester sur cette ennuyeuse ruta 3.

A 30 km du Balneario El Condor nous nous arrêtons sur le site d’observation des lions de mer le plus grand de la région, la punta Bermeja, abritant une colonie de 5000 individus.

Le temps  maussade et venteux nous refroidit un peu pour la visite, mais les jeunes filles guides nous proposent de revenir demain avec le même ticket si on le souhaite. Finalement le temps s’améliore et allons observer du haut de la falaise ces otaries. C’est le moment de la formation des harems, les mâles arrivent et choisissent leurs femelles. 1 pour 15 environ.

Les effluves portées par le vent le long de la falaise nous arrivent aux narines, une odeur forte de poisson séché. Certains individus sont excités, de jeunes mâles s’entraînent à la bagarre, les femelles se prélassent avec leurs petits de l’année passée, les mâles les plus vieux grognent et s’agitent.

De nombreux oiseaux profitent des déchets des otaries et permettent ainsi aux plages hôtes de rester propres. Nous sommes en présence de différentes sortes de mouettes, de cormorans, de palombes d'Antarctique et du fameux joli perroquet de Patagonie.

Nous restons un bon moment à les observer dans leur milieu naturel avec le plaisir d’entendre tous ces animaux s’exprimer. Ce qui nous amuse le plus est d’écouter les petits bêler comme des cabris. Nous empruntons ensuite le camino de la costa, une côte sauvage bordée d’une piste déserte, nous ne rencontrerons qu’un véhicule. La piste permet quelques accès aux plages immenses et nous ne privons pas d’un bivouac bord de mer comme on les aime. Nous sommes seuls jusque dans la soirée où quelques pêcheurs arrivent, restent deux heures les pieds dans l’eau et viennent spontanément nous offrir deux poissons qu’ils viennent de pêcher. Ils nous disent qu’il faut absolument qu’on goûte le pejerrey.

Effectivement, nous ne seront pas déçus, sa chair est très fine. Et le camion sent la friture!

Nous voyons des baleines au loin, et surtout les entendons. Leurs souffles arrivent jusqu’à nous, nous sommes sur leur chemin, elles descendent tranquillement jusqu’en Antarctique, passant bien sûr par Puerto Madryn. Nous sommes sous le charme.

19 Septembre: Le reste de la piste nous coupe du bord de mer, alors nous reprenons la ruta 3 pour arriver plus vite. Les clôtures ici témoignent de la chasse au sanglier, de façon un peu glauque les chasseurs laissent sécher leurs peaux pour en faire des fourreaux à couteaux. Et on peut voir qu’ils n’y vont pas de main morte.

De Sierra Grande, nous ne sommes plus qu’à quelques 120 km de Puerto Madryn, nous passons donc la nuit dans une aire de repos pour arriver demain matin tranquillement.

Le 20 Septembre:  Nous voilà à: